En France, la question de l’immigration reste au cœur des débats politiques et sociétaux. Avec la loi du 26 janvier 2024 visant à renforcer le contrôle de l’immigration et à améliorer l’intégration, suivie de la circulaire de janvier 2025 restreignant encore davantage les possibilités de régularisation, la situation des personnes exilées devient de plus en plus précaire. Pourtant, face à ces restrictions, la société civile et les associations caritatives, à l’image du Secours Catholique-Caritas France, continuent d’incarner une solidarité essentielle. Alors que certains pays européens commencent à reconnaître la nécessité d’une main-d’œuvre issue de l’immigration, la France, elle, durcit encore ses positions. En attendant un possible revirement, les actions de terrain restent le dernier rempart face à l’exclusion et à l’injustice.
Après la loi du 26 janvier 2024 sur le contrôle de l’immigration et l’intégration, une nouvelle circulaire, publiée en janvier 2025 par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, vient restreindre encore davantage les possibilités de régularisation des personnes exilées vivant en France.
Dans un contexte de crise politique marquée par trois gouvernements successifs en un an, les responsables politiques désignent une fois de plus l’étranger comme bouc émissaire. Pourtant, ailleurs en Europe, où les idées d’extrême droite gagnent du terrain, certains États commencent à revenir sur leurs restrictions migratoires, prenant conscience que leur population vieillissante a besoin de renforts venus d’ailleurs.
En attendant une éventuelle évolution en France, les associations caritatives, telles que le Secours Catholique-Caritas France, pallient les lacunes de l’État en offrant aux exilés ce qui devrait être un droit fondamental : la fraternité, pourtant inscrite sur toutes les façades de nos mairies.
Vivre sept ans dans l’ombre, sans pouvoir travailler légalement, contraint à accepter des emplois précaires et sous-payés, est une épreuve. Chaque année est pourtant une opportunité de tisser des liens avec les habitants, de gagner en confiance et de se reconstruire. Mais ce parcours est semé d’embûches : trouver un établissement de formation qui accepte d’ouvrir ses portes, réunir des équipes pour accompagner les démarches administratives, chercher un hébergement stable, car sans toit, il est impossible d’apprendre et de se projeter.
Beaucoup arrivent en France en espérant y trouver un pays des droits humains. Certes, des services existent, comme l’accès aux soins de santé primaires, mais désormais soumis à un délai de trois mois et à une complexité administrative dissuasive. L’accès à l’éducation gratuite pour les enfants, souvent perçu comme un espoir pour les familles exilées, est également un parcours du combattant, alors que dans leurs pays d’origine, l’absence d’enregistrement à l’état civil et le manque de moyens rendent l’école inaccessible.
L’engagement associatif des personnes exilées apporte un souffle nouveau à nos équipes. Certains découvrent ou redéploient des compétences utiles à la communauté d’accueil, d’autres, diplômés, forment les bénévoles et soutiennent les plus précaires. Ces multiples contributions à la société restent pourtant peu reconnues. Il est crucial de raconter une autre histoire de la migration, de déconstruire les préjugés et de combattre les idées reçues.
Dans ma ville, le médiateur d’un accueil de jour est originaire du continent africain. Son rôle est essentiel pour fluidifier les interactions : entre les cuisiniers et les personnes à la rue venant chercher un repas chaud, parfois sans même passer par la douche ; entre l’équipe administrative et ceux qui, épuisés par des années d’errance, trouvent en lui une oreille attentive et un repère apaisant. Parmi les bénévoles aidant les sans-abris, plus de la moitié sont des jeunes exilés qui refusent d’attendre une hypothétique régularisation pour s’engager activement dans la société française.
Et que dire de ces enfants qui, malgré des conditions de vie précaires, s’accrochent à l’école, partageant avec leurs frères et sœurs un espace de vie exigu ?
Cette circulaire vient fragiliser des personnes déjà en grande précarité. Mais elle ne pourra jamais altérer leur dignité ni leur humanité. Du moins, je l’espère. Si nous restons à leurs côtés, alors ensemble, nous pourrons bâtir un avenir plus juste.
Laurence Huard ,
Chargée de Projets Migrants
Secours Catholique - Caritas France